Jean-Luc MélenchonCinq après sa marche de Nation à Bastille, Jean-Luc Mélenchon remet le couvert ce samedi 18 mars et, partant de cette même Bastille, rallie cette fois la République. Ses mots d’ordre : « Abolir la monarchie présidentielle » et faire advenir « la VIe République ». En sa compagnie : 130 000 personnes, dixit les organisateurs.

Si les affluences à ce genre de manifestations prêtent toujours à débats, le succès n’en paraît pas moins incontestable, et il était sans doute bien nécessaire pour le tribun insoumis, dont les sondages restent collés à ceux de Benoît Hamon aux alentours de 12-14%, loin de François Fillon (17-19%) et plus loin encore d’Emmanuel Macron et Marine Le Pen (25-27%). Bref, le match à gauche tourne à la neutralisation de ses participants, qui n’ont pour l’heure aucune perspective de second tour devant eux. Le besoin d’une démonstration populaire devenait dès lors critique pour Mélenchon, qui a réussi son pari. Sera-ce suffisant pour insuffler un nouvel élan à sa campagne ? La marche de 2012 avait elle aussi été un succès de foule mais, au bout du compte, ne lui avait pas permis d’accélérer franchement la dynamique qui le portait alors dans les mêmes eaux qu’aujourd’hui.

 

Benoit Hamon en 2012Le lendemain (dimanche 19), c’est au tour de Benoît Hamon de tenir son grand meeting de campagne. A la différence de Mélenchon, pas de grand rassemblement en plein air, mais un événement fermé, dans une salle aux dimensions appréciables (Bercy, 20 000 places), où se masse un public chauffé à bloc. Hamon y tient pendant une heure et demie un discours plutôt bon (en voir le compte-rendu), qui galvanise ses troupes. Ici aussi, le sentiment de réussite prévaut. Pour le dire autrement, le PS a montré qu’il était encore capable organiser une démonstration de force. Comme Mélenchon toutefois, la vraie question sera de celle l’après-meeting : oui ou non celui aura-t-il permis à Hamon de passer la vitesse supérieure, ou ne sera-t-il qu’un coup dans l’eau ?

Avant Bercy, la semaine de Benoît Hamon a été marquée par une nouvelle défection. Ou, plutôt, par l’officialisation de ce qui était un secret de polichinelle : le refus de Manuel Valls de le soutenir. L’ex-Premier ministre a ainsi déclaré mardi 14 à Paris Match qu’il ne pouvait « pas apporter [s]on parrainage à Benoît Hamon ». En cause a-t-il plus tard expliqué : d’une part sa cohérence personnelle (il ne croit pas à la sortie du nucléaire, au revenu universel, à la légalisation du cannabis), et d’autre part une « forme de sectarisme » chez le vainqueur de la primaire, à qui il reproche une orientation politique trop radicale qui marginalise le PS et l’entraîne dan la voie d’un « long crépuscule, comme le PCF avant lui ».

Si ces déclarations sont peu surprenantes au vu du gouffre idéologique qui a séparé les deux hommes pendant la primaire, elles n’en soulignent pas moins une nouvelle fois la déchirure profonde qui mine le PS et que rien ne semble en mesure d’arrêter. Les hamonistes n’ont en tout cas pas manqué de critiquer l’attitude de Valls, certains parlant de « trahison » et lui reprochant de ne pas respecter l’engagement pris par les candidats à la primaire, comme François de Rugy l’avait déjà fait voici quelques semaines, ce dernier allant jusqu’à rallier Macron, ce que Valls a démenti vouloir faire. A contrario, la présidente du PRG Sylvia Pinel, qui avait elle aussi participé à la primaire et appelé à voter Valls au second tour, soutiendra bien Hamon suite à l’accord validé avec le PS pour les législatives.

Autre temps fort de la semaine de Hamon : la présentation jeudi 16 de la version ajustée de son programme, dont la dernière mouture datait de la primaire et devait être actualisée suite à l’accord conclu avec l’écologiste Yannick Jadot et le besoin de (tenter de) rassembler au sein du PS. Bilan des opérations ? Si les grandes lignes sont conservées (revenu universel, transition écologique, l’accent est également mis sur la relance de l’activité via l’investissement et aussi le Made in France cher à Arnaud Montebourg (voir ici pour plus de détails sur ce programme).

 

Nicolas Dupont-Aignan en 2011Lundi prochain aura lieu sur TF1 le très attendu débat du premier tour, lequel mettra aux prises les cinq candidats aux sondages supérieurs à 10% (Le Pen, Macron, Fillon, Hamon et Mélenchon). Ce choix (annoncé depuis plusieurs semaines) d’exclure les « petits candidats » de l’événement suscite l’ire de Nicolas Dupont-Aignan qui, après avoir parlé d’un « viol de démocratie » au moment où cette nouvelle a été dévoilée, décide de saisir le Conseil d’Etat pour qu’il oblige TF1 à l’inviter. Ledit Conseil accepte d’étudier la question en référé mais, jeudi 16 mars, rejette le recours introduit par le candidat de Debout la France, jugeant que son absence du débat ne constituerait pas « une atteinte grave et manifestement illégale au pluralisme de l’expression des courants de pensée et d’opinion ».

S’il n’a pas obtenu gain de cause, Dupont-Aignan entend toutefois bien clamer haut et fort son courroux. L’occasion lui en offerte samedi soir, alors qu’il est invité au 20h de … TF1. Face à une journaliste médusée, il commence par déclarer que « la démocratie est en danger », parle d’une présidentielle « volée » et annonce qu’il a « le devoir de quitter le plateau », ce qu’il fait dans la foulée. Aussitôt l’esclandre fait le buzz et offre à Nicolas Dupont-Aignan une exposition médiatique non-négligeable, tout en soulignant les problèmes posés par l’adoption de l’équité du temps de parole en lieu et place de son l’égalité.

 

Compte Twitter de François Fillon - Février 2017La semaine de François Fillon a été marquée par deux premières journées aux parfums très différents. Le lundi 13 a en effet été l’occasion pour lui de présenter la mise à jour de son programme, lequel devait être ajusté pour incorporer les nouvelles propositions portées par le candidat depuis la fin des primaires. A l’arrivée, les modifications sont peu nombreuses et relativement secondaires, le coeur du programme défendu par François Fillon restant le même (en voir le détail ici).

Très différente a été la journée de mardi du candidat républicain. C’est en effet ce jour-là qu’il a été entendu par les magistrats chargés d’enquêter sur le Penelopegate. Au départ prévue pour le mercredi 15, cette comparution a été secrètement avancée de vingt-quatre-heures à la demande des avocats de François Fillon pour éviter le tumulte médiatique qui n’aurait pas manqué de se produire. Au cours de l’entretien, les juges ont notifié à l’intéressé sa mise en examen au titre de détournement de fonds public, complicité et recel de détournements de fonds publics, complicité et recel d’abus de biens sociaux et manquement aux obligations déclaratives. De son côté, François Fillon s’est borné à lire aux magistrats une déclaration préparée à l’avance.

Du point de vue la campagne, cette nouvelle n’a pas vraiment provoqué de nouveaux remous, son onde de choc s’étant déjà propagée deux semaines auparavant, lorsque Fillon avait lui-même annoncé la convocation dont il faisait l’objet et, dans la foulée, joué son va-tout au Trocadéro, de sorte que la mise en examen qui lui a été signifiée ce mardi est venue davantage comme une confirmation que comme un rebondissement bouleversant la donne. La pression n’en va pas moins rester de mise pour le candidat républicain, qui continue de voir diverses révélations s’abattre sur lui. Ainsi :

  • concernant le « prêt » de € 50 000 consenti (sans intérêt) par Marc Ladreit de Lacharrière (le propriétaire de la Revue des Deux mondes) que Fillon a omis de faire figurer dans sa déclaration de patrimoine, le Canard enchaîné rapporte que celui-ci a été remboursé en catastrophe fin février avant que l’affaire ne soit rendue publique, ceci afin de limiter les dégâts électoraux et permettre au candidat républicain de dénoncer une opération de déstabilisation lorsqu’elle a été dévoilée.
  • concernant les costumes d’une valeur de € 48 500 euros offerts à François Fillon, l’identité d’au moins un des généreux amis auteurs de ces cadeaux est désormais connue : l’avocat Robert Bourgi, notamment connu pour son implication dans les réseaux liés à la Françafrique. Si ce dernier a reconnu avoir offert pour 13 000 euros de vêtements à François Fillon en février dernier, le doute demeure concernant les autres 35 500 euros, qui pourraient être le fait de Bourgi ou pas. De son côté, le Parquet national financier (PNF) a élargi l’enquête concernant le Penelopegate à cette nouvelle affaire afin de découvrir si un trafic d’influence n’y est pas lié.
  • concernant les salaires perçus comme assistants sénatoriaux par les enfants Charles et Marie Fillon, le journal Le Parisien annonce que ceux-ci ont été en partie reversés aux parents Fillon : à hauteur de 70% pour Marie Fillon et de 30% pour son frère. Les explications avancées par leurs avocats (rembourser le prix de son mariage pour la première, rembourser de l’argent de poche et le loyer d’un studio pour le second) ne manquent pas de faire sourire, d’autant que plusieurs éléments contradictoires y sont vite repérés.

 

Emmanuel Macron 2016Dévoilée la semaine dernière, la polémique liée à la tenue d’une soirée à Las Vegas en février 2016 (la French Tech Night) rebondit avec l’ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet de Paris. Les implications pour Emmanuel Macron sont pour l’instant nulles, le soupçon de favoritisme dans l’attribution de l’organisation de ladite soirée ne le visant pas, mais portant plutôt sur l’organisme Business France. L’affaire en reste donc au stade de tempête dans un verre d’eau en ce qui le concerne. En revanche, l’association de lutte contre la corruption Anticor a saisi la Haute Autorité pour la transparence afin qu’elle vérifie le caractère « exhaustif, exact et sincère » de sa déclaration de patrimoine, l’association y ayant détecté un « manque de cohérence ». Le même jour (lundi), dans une interview publiée dans La Croix, Emmanuel Macron s’est exprimé à ce sujet pour justifier la différence entre patrimoine déclaré et revenus perçus, l’expliquant notamment par les impôts et cotisations qui l’ont frappé.

Concernant sa campagne, celle-ci est marquée par la visite qu’il rend à Angela Merkel pendant une heure à Berlin. La chancelière allemande avait déjà rencontré Fillon précédemment et entend bien ne pas prendre parti dans la présidentielle française, se déclarant prête à recevoir tout candidat qui le désire, à l’exception de Marine Le Pen. Peu importe pour Emmanuel Macron, qui y voit l’occasion d’affirmer sa stature internationale.

Rayon alliances, la semaine est marquée par le ralliement du sénateur de droite apparenté LR Jean-Marie Lemoyne. Bien que de notoriété modeste, ce renfort est une bonne nouvelle pour Macron, qui jusqu’ici a surtout attiré des renforts de gauche et du centre.

 

Marine Le PenConcernant Marine Le Pen, une info à signaler : la procédure d’expulsion entamée à l’encontre d’un membre du FN en PACA, Benoît Loeuillet. En cause : des propos négationnistes (« Je pense qu’il n’y a pas eu autant de morts, il n’y en a pas eu 6 millions. (…) Il n’y a pas eu de morts de masse comme ça a été dit ») enregistré en caméra cachée par des journalistes préparant un reportage diffusé mercredi 15 sur la chaîne C8. Cette scène avait été filmée dans la libraire que gère le militant frontiste, une librairie dans laquelle il vend notamment des livres du négationniste Robert Faurisson. Les cadres du FN ont réagi vivement aux propos de M. Loeuillet, notamment le vice-président du parti (et compagnon de Marine Le Pen) Louis Aliot, lequel a déclaré : « Les caméléons qui se cachent dans nos rangs et profitent de la réussite du FN en ayant des idées parfaitement détestables doivent dégager ».

 

Parrainages : les verdicts sont tombés : fumée blanche pour Philippe Poutou (NPA), Jacques Cheminade (Solidarité et Progrès) et Jean Lassalle (Résistons !). Ils s’ajoutent aux huit candidats dont les cinq cents parrainages étaient déjà certains. Ils seront donc onze à se présenter au premier tour. Parmi ceux-ci, outre les cinq les plus en vue, rappelons la présence de Nathalie Arthaud (LO), François Asselineau (Union populaire républicaine) et Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France).

 

Les postulants ayant échoué finissent en revanche loin du cut, la plus proche en étant Rama Yade avec 353. Derrière elle … Alain Juppé (313), Alexandre Jardin (165), Charlotte Marchandise (135), Oscar Temaru (109), Michèle Alliot-Marie (74) et beaucoup d’autres, dont … François Hollande, qui a reçu 7 parrainages.