9 mars – Ni fort ni faible : un Benoît Hamon neutre à « L’Émission politique »

Jeudi, Benoît Hamon était invité dans « L’Émission politique » sur France 2.

Si le ton de la soirée est toujours resté courtois, elle n’en pas moins été le théâtre d’échanges tendus, notamment lors de la discussion avec le journaliste économique Thomas Lenglet (lequel semblait consterné par les vues de Hamon sur la raréfaction du travail et le revenu universel), ou encore pendant l’entretien en duplex avec le maire de Montpellier Philippe Saurel (ex-PS, désormais chez En Marche) concernant la réforme des rythmes scolaires, que Hamon a en partie pilotée lorsqu’il était ministre de l’Éducation et sur laquelle Macron veut revenir.

La partie la plus âpre de la soirée était toutefois encore à venir : un face-à-face avec Laurent Wauquiez sur la laïcité. D’emblée Wauquiez attaque et reproche à Hamon d’être prêt à des accommodements avec le communautarisme islamique. Face à ces accusations, le candidat socialiste traite Wauquiez « d’hologramme de Marine Le Pen », ce à quoi le député LR réplique par : « J’espère que vous, vous n’êtes pas un hologramme de Tariq Ramadan ». Les amabilités ne s’arrêtent pas là, Hamon accusant Wauquiez et son parti de remettre en cause la loi de 1905, de monter en épingle des cas particuliers pour en faire des généralités, et d’attribuer aux musulmans des maux qui ne leur sont pas propres (cf. le sexisme dans le cas de l’affaire du café de Sevran). De son côté Wauquiez reproche à Hamon de ne pas vouloir traiter les problèmes des quartiers, puis conclut en comparant sa proposition d’instaurer un visa humanitaire à une « opération portes-ouvertes » pour l’immigration. La passe d’armes entre les deux hommes a donc été musclée et, si Hamon produisit une bonne défense de la loi de 1905, Wauquiez n’en a pas moins renforcé l’impression que le vainqueur de la primaire de la gauche n’avait pas toujours une position claire sur les questions abordées ici.

Autres sujets évoqués

Le passage le plus commenté de l’émission a sans doute été celui concernant le revenu universel, dont Hamon a revu à la baisse la première phase. Ainsi, alors que tous les jeunes de 18 à 25 ans étaient supposés bénéficier dès 2018 d’un revenu d’existence de 600 euros versé quel que soit leur niveau de ressources, la nouvelle mouture présentée par le socialiste ne s’appliquera plus dans son intégralité qu’aux jeunes sans ressources, ceux ayant des petits revenus devant se contenter d’une allocation moindre, voire … nulle s’il gagne plus d’un 1,9 smic. Raison de ces ajustements : réduire le coût estimé de cette mesure, lequel passerait de 45 à 35 milliards d’euros par an et la rendrait un peu plus présentable budgétairement. Pas sûr toutefois que cela ne satisfasse ni ses détracteurs qui continueront à crier à la folie dépensière, ni ses partisans qui pourraient y voir une forme de renoncement …

Parmi les autres sujets abordés au cours de la soirée :

• l’objectif de Hamon d’avoir une France basée à 100% sur les énergies renouvelables d’ici 2050
• une entrevue avec des policiers critiquant sa proposition de récépissé pour les personnes contrôlées en rue afin de réduire les contrôles au faciès
• une discussion avec le cuisinier Thierry Marx (l’invité-surprise) sur la valeur travail
• une autre discussion avec un agriculteur concernant sa volonté d’interdire les pesticides dangereux
• un débat sur l’euthanasie (dont Hamon veut accroître les possibilités d’usage) avec une médecin œuvrant dans l’accompagnement des malades en fin de vie.

La prestation de Benoît Hamon

Elle a été du genre « neutre », c.-à-d. sans étincelles ni moments vraiment faibles. De manière générale, Hamon n’a pas hésité à brandir l’argument « Marine Le Pen » pour tenter de décrédibiliser ses adversaires. Cela fut vrai avec Wauquiez donc, cela le fut aussi lorsqu’il a été amené à parler de Macron, dont il a affirmé que les politiques libérales qu’il préconise (moins de fonctionnaires et de services publics) avaient servi de « marchepied à l’extrême-droite » dans les pays où elles avaient été appliquées. Dans un autre registre, il fait preuve de persévérance pour éluder les questions qui lui déplaisaient et ne pas avoir à trop y répondre malgré les relances de Pujadas (p. ex. :sur les dissensions au sein du PS ; sur la manière dont il compte développer l’éolien si contesté par les riverains ; sur sa volonté de ne pas appliquer le résultat du référendum concernant Notre-Dame-des-Landes ; sur l’union des gauches européennes et la renégociation des traités avec l’Allemagne).