Compte Twitter de François Fillon - Février 2017François Fillon a-t-il perdu toute mesure ? Alors que de énièmes révélations viennent une nouvelle fois de mettre sa campagne aux abois, le candidat républicain profite de son passage dans « L’Émission politique » pour déclencher l’arme nucléaire. Se basant sur les bonnes feuilles d’un livre à paraître dont il a eu connaissance (« Place Beauvau, Police : Les secrets inavouables d’un quinquennat » par … des auteurs du Canard enchaîné), François Filon accuse nommément le président de la République François Hollande d’être l’auteur d’une machination à son encontre et d’avoir mis en place un cabinet noir pour faire remonter à lui en complète illégalité toute une série d’écoutes et orchestrer les fuites qui abreuvent depuis plusieurs semaines les médias. « Un scandale d’Etat » affirme-t-il, non sans prendre une (discrète) précaution oratoire (« si ces allégations sont vraies »).

Alors que l’émission n’est pas terminée, le Président publie un communiqué dans lequel il condamne « avec la plus grande fermeté les allégations mensongères » proférées ce soir, tandis que Jean-Jacques Urvoas, l’actuel garde des sceaux, déclare que François Fillon « a voté systématiquement contre tous les textes renforçant l’indépendance de la justice et favorisant l’indépendance ». De son côté, l’un des auteurs du livre (Didier Hassoux) dément avoir « jamais écrit ça ». Quant au compte Twitter de l’émission, il est pris d’assaut et enregistre 170 000 messages alors que le maximum atteint pour un autre invité avait culminé à 100 000. Bref, si l’un des objectifs de cette sortie était de faire du bruit, il est pleinement atteint. Quant à savoir si cela sera au profit de l’intéressé …

 

Un peu avant cette tirade, François Fillon avait commencé par jouer sur une autre corde pour tenter de se défaire des accusations à son encontre, celle de l’homme atteint au plus profond de sa dignité : « La presse véhicule de moi depuis des jours et des jours l’image d’un homme corrompu. C’est une image qui me blesse et m’a fait souvent penser à Pierre Bérogovoy. J’ai compris pourquoi on pouvait être amené à cette extrémité quand, tout d’un coup, l’image qui est donnée de vous est le contraire de ce que vous êtes ».

La comparaison avec l’ex-Premier ministre de François Mitterrand (qui s’est suicidé en 1993 suite à de forts soupçons de corruption) ne manque pas de faire grincer des dents, notamment celles de l’écrivaine Christine Angot. Celle-ci est « l’invitée-surprise » de l’émission, et c’est peu dire que, lors de son intervention, elle n’y va pas avec le dos de la cuiller, attaquant frontalement le candidat Les Républicains sur sa légitimité, sur l’incertitude que ferait peser un second tour Fillon-Le Pen et en le tançant vertement pour les cadeaux qu’il a acceptés et le fait de s’être mis en position de devoir rendre des services à ceux qui les lui ont offert. D’échanges, il n’est pas vraiment question, Angot lit un texte qu’elle a préparé et n’entend pas réellement le laisser répondre. Le journaliste Pujadas intervient alors et parvient à lui donner la parole. « De quel droit me condamnez-vous, madame ? » Angot insiste et l’enguirlande pour ses propos sur Bérégovoy : «  Est-ce que vous me faites un chantage au suicide ? Ça ne passe pas. » Quelques instants plus tard, Angot se lève et s’en va, non sans lâcher une dernière attaque : « Vous savez pourquoi ils [Pujadas et France 2] m’ont invitée ? Parce que ce que je viens de dire, eux, ils ne le peuvent pas ». Et la scène de se conclure par les mots surréalistes d’un Pujadas faisant la promo d’une pièce de théâtre d’Angot en train de se jouer à Paris.

Christine Angot dans « L'émission politique »

 

Le reste de l’émission

 

  • La soirée s’est ouverte sur les attaques terroristes qui ont frappé Londres la veille (quatre morts) et la question de savoir comment se protéger contre de tels événements.
  • Concernant les affaires, François Fillon continue de soutenir mordicus que les pratiques reprochées envers son épouse étaient légales et que le travail qu’elle effectuait était réel. Sur l’histoire des costumes, des prêts et des contrats de sa société de conseil, il réfute avoir jamais subi une quelconque influence. « Je suis honnête, je n’ai jamais pris une décision contraire à l’intérêt général ». Il concède toutefois qu’accepter les costumes a été une erreur et qu’il les a rendus.
  • Concernant le pouvoir d’achat, le journaliste économique François Lenglet fait remarquer chiffres à l’appui que les mesures fiscales qu’il préconise vont favoriser marginalement les familles modestes (+1,5% de leur revenu moyen) mais énormément les foyers fortunés (+28%). Fillon explique que, pour augmenter l’emploi, il faut relancer l’activité économique, notamment via la suppression de l’ISF qui incitera les plus grosses fortunes à investir davantage.
  • Le reportage de mi-émission a été l’occasion de voir François Fillon rendre visite à des travailleurs d’un hôpital, pour une discussion sur sa volonté d’augmenter les heures de travail et de réduire l’encadrement administratif. Les échanges ont été courtois mais animés, et c’est un euphémisme de dire que les propositions du candidat LR n’ont pas suscité beaucoup de ferveur, les conversations s’achevant généralement sur une impasse où chacun campait sur ses positions, les employés parlant de la pénibilité de leur emploi, Fillon d’un pays qui n’a pas le choix et doit agir vu qu’il a 100% de PIB de dette.
  • La rencontre en plateau avec des Français a porté d’abord à un débat avec une historienne sur le « roman national » que Fillon veut promouvoir, puis sur une discussion avec les difficultés rencontrées par une chômeuse longue durée à obtenir des entretiens d’embauche.
  • Face-à-face politiques : le premier a opposé Fillon au maire FN de Hénin-Beaumont Steeve Briois (en duplex) et a porté sur l’immigration ; le second a mis en présence le candidat républicain avec l’ex-ministre de la Culture et actuel soutien de Benoît Hamon Aurélie Filipetti, et a porté sur les mesures sociales radicales que François Fillon prône dans son programme.

Articles récents

7 mai – Où Macron est élu président

7 mai – Où Macron est élu président

En dépit d’une abstention substantielle, Emmanuel Macron remporte le second tour avec une avance nette et devient le nouveau président de la République.

La « Trilogie de la Guerre » de Roberto Rossellini

La « Trilogie de la Guerre » de Roberto Rossellini

Italie, 1945. Dans un pays dévasté, une génération nouvelle de réalisateurs invente le néoréalisme. Parmi ses fers de lance : Roberto Rossellini, qui, en trois ans et trois films, accède au statut d’auteur majeur du 7ème Art.

Solaris (1972) – Andreï Tarkovski

Solaris (1972) – Andreï Tarkovski

En dépit d’années d’observations, la planète Solaris garde ses mystères, dont le principal n’est autre que sa surface, un océan gigantesque qui serait en fait … un cerveau.

Antelope Canyon – De lumière et de grès

Antelope Canyon – De lumière et de grès

Si certains patelins reculés n’ont rien pour eux, la petite ville de Page, elle, est doublement bénie des dieux, avec, en point d’orgue, un site parmi les plus photogéniques des Etats-Unis.

Lava Beds – L’ultime champ de guerre des Modocs

Lava Beds – L’ultime champ de guerre des Modocs

Isolé aux confins nord-est de la Californie, le parc de Lava Beds compte deux principaux centres d’intérêt : ses cavernes, et le souvenir de la résistance opiniâtre qu’y livra une poignée d’Indiens.

Les dynamiques qui ont fait basculer l’élection

Les dynamiques qui ont fait basculer l’élection

12 novembre 2016 – Si la victoire de Donald Trump est nette en termes de grands électeurs, elle s’est pourtant jouée à quelques États-clefs qui ont basculé de justesse en sa faveur. Pour expliquer ce résultat, plusieurs dynamiques sont …